Madiba 2

Mandela_2Le monde, disais-je l’autre soir, est bien fait. Brossé à (très) grands traits, il est constitué d’une part, des riches, d’autre part, des pauvres. Et alors ? Plaindre ces derniers relèverait d’un manque de discernement. Ils jouissent en effet, quoique selon des modalités différentes, de la même félicité que les nantis. Et si j’osais, ajoutais-je, je prétendrais qu’ils sont, au bout du compte, mieux lotis que les riches.

Je promettais d’expliquer cet apparent paradoxe et m’en vais, derechef, m’y employer. A cette fin, je poserai en préambule un double postulat :

Postulat 1 : le temps est composé de trois éléments : le passé, le présent et le futur. Ce dernier n’existant pas encore et n’étant habité que d’hypothèses, d’espoirs et surtout d’illusions, il compte pour beurre. Exit donc le futur. Nous restent le présent et, celui qui se taille la plus grosse part du grand gateau du temps, le passé, ou, si vous préférez, l’Histoire.

Postulat 2 : les concepts de “riches” et de “pauvres” se superposent impeccablement aux concepts “d’oppresseurs” et “d’oppressés”. Je sais bien que depuis la fin proclamée de la lutte des classes, ce postulat ne va plus de soi, mais dussiez-vous le contester, il faudra me démontrer la capacité d’oppression du pauvre et produire des exemples d’asservissement dont le riche ferait éventuellement l’objet. Bon courage.

Ces deux postulats étant posés, que constate-t-on ? Eh bien, c’est simple… le présent appartient aux nantis, aux puissants, aux méchants, aux oppresseurs, l’Histoire appartient aux pauvres, aux gentils et aux opprimés. Et si vous rapportez la durée (pfffuit !) du présent à celle, interminable, du passé et de l’Histoire, avouez que, dans la balance, le fléau de la félicité penche résolument du côté de l’opprimé. Petit veinard !

Je m’explique : tandis que le pauvre, l’opprimé, en ch… des ronds de chapeaux dans le temps présent (mais fugace) sous l’œil goguenard du puissant repu, l’Histoire, toujours, rend hommage au premier. Il suffit de fréquenter les musées pour s’en convaincre. Des salles entières s’apitoient sur les conditions de vie des esclaves d’antan (pour ceux d’aujourd’hui, il faut attendre encore un peu) et traînent dans la boue les négriers alors honorés, dans un présent (pfffuit !) révolu. Ici, on glorifie, sur d’immenses panneaux, les luttes sociales de façon outrageusement partiale sans un mot de commisération à l’endroit des patrons, des oppresseurs alors empêchés par le cancer des grèves et des revendications. Là, on vous encense le docteur Willermé qui faisait sa chochotte parce que des mômes bossaient à l’usine avant l’âge de 8 ans alors qu’en 1841, le monde de l’entreprise détectait, dans ses propositions, une menace létale sur l’industrie française. Enfin, je ne connais pas le musée des Houillères de Lorraine (doit bien en exister un) mais je gage qu’il exalte le jeune galibot, le piqueur, le boiseur, l’encageur, le palefrenier, le pompeur, le lampiste, le forgeron et le charpentier, qu’il décline, par le menu, la vie misérable des mineurs, sans jamais s’extasier sur le train de vie de ceux qui en étaient la cause.

Bref, à peine passé, à peine trépassé, le puissant, le nanti, l’opresseur, le tyran, est déjà controversé, son action est dénoncée et sa mémoire salie. A l’inverse, il suffit à l’opprimé de croupir vingt-sept petites années dans quelque ergastule à l’atmosphère corrompue pour s’assurer postérité et reconnaissance universelle. C’est un peu facile, non ?

En tout cas, vous comprendrez mieux désormais pourquoi le riche, le nanti, le puissant, l’oppresseur vous donne parfois le sentiment d’être un peu bourru pour ne pas dire brutal. Mettez-vous à sa place. Il sait, le malheureux, que le temps lui est compté, que tôt ou tard, fût-ce de façon posthume, tous les petits, tous les sans-grades, rafleront les honneurs, alors… il en profite un peu… c’est humain. De là à dire qu’il abuse, y a pas lerche. Mais franchement…

CowboyCowboy

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3 commentaires pour Madiba 2

  1. Jafec Vysenor dit :

    Comme vous avez raison, Cowboy ! J’ai visité, il n’y a pas longtemps, le centre historique minier de Lewarde. Eh bien, pas un mot sur les propriétaires et les actionnaires de ces mines, leur mode de vie, leurs dividendes, etc… il semble même qu’ils n’aient jamais eu l’occasion de descendre au fond !

    • Cowboy dit :

      Ah, qu’est-ce que je disais ! Franchement, vous me rassurez parce que… des fois… ce que je dis me paraît tellement évident que j’y soupçonne moi-même un lézard (ou une forme de mauvaise foi, diraient certains). C’est vrai quoi… Puisqu’on sait qu’à terme, justice sera « toujours » rendue aux opprimés, pourquoi diable ne fait-on pas l’effort d’avancer un peu la date de cette reconnaissance en leur épargnant des souffrances qui, certes, les grandissent aux yeux de l’Histoire et de leur descendance, mais qui -faut bien le reconnaître- leur pourrissent un peu la vie. Enfin, c’que j’en dis… 🙂

  2. rose dit :

    tilali tilala

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